La Libération du camp

La Libération du camp

Le 23 avril 1945, Anna est libérée du camp de Ravensbrück par l’action de la Croix-Rouge suédoise : 

« Un matin au réveil, au lieu de la colonne des travaux forcés, nous avons formé une colonne de Libération escortée par des soldats de la Croix-Rouge suédoise, jusqu’à la sortie du camp. Là, stationnaient des ambulances pour les déportées françaises (…). En Suède, pendant plusieurs mois, on nous a soignées, sauvées de la mort qui nous attendait à coup sûr. Et j’ai eu le bonheur de revoir ma mère, de vivre avec elle bien des années et ce bonheur c’est au peuple suédois que je le dois »

Anna Garcin-Mayade, La libération du camp, Fusain sur papier, 51 cm x 66 cm - Coll. mairie de Pontgibaud, n°39

Au total, ce sont 600 femmes qui sont libérées du camp de Ravensbrück par la Croix-Rouge suédoise les 23 et 25 avril 1945. Elles sont conduites dans des bus blancs de la Croix-Rouge dans différents centres où elles reçoivent les premiers soins. Anna passe deux mois en Suède, certainement dans le centre de Malmö, où médecins et infirmières rééduquent les déportées.

Des écoles, des salles communales sont alors transformées en hospices. Les Lottas, les infirmières volontaires suédoises, sont aux services de femmes épuisées. Une légation française vient photographier chacune d’entre elles pour produire de nouvelles pièces d’identité, on leur redonne une humanité. Les listes des femmes arrivées en Suède sont diffusées à la radio française et publiées à la une des quotidiens. Mi-juin, les rapatriements par avion sont organisés. Tous les deux jours environ, quinze à vingt femmes atterrissent au Bourget avant de rejoindre en bus l’hôtel Lutetia.

A leur arrivée en Suède, ces femmes sont couvertes de vermine, de furoncles, de plaies, et certaines le corps pourri par l’avitaminose. Leurs vêtements et tous leurs effets personnels sont brûlés pour des raisons sanitaires. Anna avait le corps rempli de furoncles et de plaies, et autour de ses cicatrices, des poux. Les médecins suédois ont d’abord retiré les poux, ont fait doucher les déportées, et les ont fait dormir dans un bon lit. En se confiant à Béatrice Cibot le 4 mai 1976, Anna lui explique qu’elle ne parvenait pas à dormir et qu’elle ne « pouvait pas supporter la couverture« . Les médecins prennent les températures de chacune des femmes libérées, et leur donnent du lait pour les désintoxiquer. Ils les réalimentent progressivement avec du poison, du porridge et de l’huile de foie de morue. A son arrivée en Suède, Anna pèse 40 kilos. Pendant sa convalescence, elle réussit à reprendre 15 kilos avant d’être rapatriée en France le 2 juillet 1945.

"Nous étions soignées merveilleusement, merveilleusement. Et on nous a rééduquées, les infirmières nous ont rééduquées, on nous a réappris à marcher, parce que je ne pouvais plus me tenir debout moi, c'était fini. En sortant du Block 6, vous pensez bien que... j'en pouvais plus !"
Anna Garcin-Mayade (4 mai 1976)

Les Suédois, pour aider les anciennes déportées psychologiquement, leur montrent des films sur la Libération de Paris, qui n’ont absolument aucun effet sur elles. Mais un jour, dans un documentaire sur la Laponie, un chat apparaît ! 

« Nous étions folles de joie, mais folles de joie de voir un chat« , s’exclame Anna dans son interview. 

Les femmes préfèrent la compagnie des animaux, à celle des hommes après toutes les horreurs vécues. Anna exprime que « le ronronnement de ce chat lui a sauvé la vie« . A partir de ce moment-là, les médecins les font sortir dans un parc où se trouvent de nombreux écureuils et des hérissons : « Quelle joie ! Vous pouvez pas vous en faire une idée, c’est inimaginable, inimaginable. Notre conversation n’était faite que d’animaux, de chats, d’écureuils, tout ça. On ne pensait pas du tout à l’être humain« . 

Après deux mois passés en Suède, Anna est rapatriée le 2 juillet 1945. Elle arrive en France le 4 juillet 1945.

Une liste des réfugiés d’Allemagne a été réalisée par le Comité central de la Croix-Rouge suédoise en date du 18 juillet 1945 et envoyée au Comité International de la Croix-Rouge, Agence centrale des prisonniers de guerre à Genève. Cette liste comporte le nom d’Anne Joséphine Mayade, professeur, sous le numéro 190112.